Le système éducatif suisse prépare-t-il vraiment les enfants à la vie ? Le point de vue d’un enseignant privé

Le système éducatif suisse prépare-t-il vraiment les enfants à la vie ? Le point de vue d’un enseignant privé

Le système éducatif suisse est souvent cité en exemple pour sa qualité, sa diversité de filières de formation, et sa capacité à mêler enseignement général et formation professionnelle. Mais la question se pose : ce système, aussi rigoureux soit-il, prépare-t-il vraiment les enfants à la vie ? En tant qu’enseignant privé, j’accompagne des élèves suisses de tous horizons, souvent à la recherche de sens, d’orientation, ou d’un soutien personnalisé. Ce billet propose un regard critique, mais constructif, sur le système scolaire suisse, ses forces, ses lacunes et ses défis, à travers le prisme de l’expérience concrète de terrain.

Comment fonctionne le système éducatif suisse dans ses grandes lignes ?

Le système éducatif suisse se distingue par sa structure fédéraliste : la confédération et les cantons se partagent la responsabilité de l’éducation, avec une large autonomie laissée aux cantons. Le système est fondé sur des filières de formation différenciées, une forte perméabilité, et un accent mis sur la formation professionnelle.

L’EDK (Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique) assure une coordination générale à travers le concordat sur la coordination scolaire. Ce système s’articule autour de trois grands degrés : école obligatoire, secondaire II, et tertiaire. Il distingue par sa grande qualité, mais aussi sa complexité pour les familles, surtout celles nouvellement arrivées en Suisse.

Qu’est-ce que l’école obligatoire en Suisse et que couvre-t-elle ?

La scolarité obligatoire en Suisse dure 11 ans : deux années d’école enfantine (parfois non obligatoires selon les cantons), six années de primaire, puis trois années de secondaire I, appelé cycle d’orientation en Valais ou Collège sur Vaud. Ce cycle marque la fin de l’école obligatoire.

Durant cette période, l’accent est mis sur les fondamentaux : langues (français, allemand, parfois italien et romanche), mathématiques, sciences, sport, et culture générale avec des cours spécifiques. La formation est assurée dans des écoles publiques, avec quelques établissements privés en complément, souvent pour les élèves ayant des besoins particuliers ou les familles souhaitant une pédagogie différente.

Pour les familles nouvellement arrivées qui ont des difficultés avec ce système complexe, notre accompagnement personnalisé peut faciliter l’adaptation.

Le secondaire I : une première sélection utile ou trop précoce ?

Le degré secondaire I débute vers l’âge de 12 ans. C’est à ce stade que les élèves sont souvent répartis dans différentes sections selon leurs résultats et leur profil. On retrouve cette organisation en Suisse romande, avec des regroupements orientant déjà vers le secondaire II.

Beaucoup d’enseignants privés critiquent cette sélection précoce. Si elle peut motiver certains jeunes, elle en exclut d’autres trop tôt, parfois pour des raisons de maturité, de difficultés passagères ou de méthode de travail. La pression monte dès le début du cycle d’orientation, avec une peur de “rater sa vie” dès 13 ans. Est-ce là une réelle préparation à la vie ou une course aux notes prématurée ?

Le secondaire II : trop de filières ou une richesse de parcours ?

Le degré secondaire II couvre les années qui suivent la scolarité obligatoire. C’est là que les filières de formation se multiplient : formation professionnelle, école de culture générale, écoles de maturité gymnasiale, ou filières duales combinant école et entreprise.

Environ 2/3 des jeunes suisses âgés de 15 à 20 ans suivent une formation professionnelle, souvent sous forme de formation duale (apprentissage en entreprise + école). Les autres optent pour une maturité gymnasiale (voie générale) ou une maturité professionnelle après un apprentissage.

Cette diversité reflète une forte perméabilité, qui permet de poursuivre une formation professionnelle supérieure, ou d’accéder aux hautes écoles spécialisées, voire aux hautes écoles universitaires. Néanmoins, pour certains jeunes, le choix de filière est vécu comme un labyrinthe difficile à décrypter, avec des conséquences durables sur leur avenir.

Et après ? Le degré tertiaire et la transition vers la vie adulte

Le degré tertiaire en Suisse comprend trois voies principales : les hautes écoles spécialisées et hautes écoles pédagogiques, les deux écoles polytechniques fédérales, et les hautes écoles universitaires. À cela s’ajoute la formation professionnelle supérieure, accessible aux titulaires d’un certificat fédéral de capacité (CFC).

Ce niveau d’éducation est très performant : la Suisse des hautes écoles est internationalement reconnue. Toutefois, la transition vers la vie active reste difficile pour certains jeunes, surtout ceux issus de filières plus techniques, pour qui la reconnaissance des diplômes ou l’accès à l’emploi peuvent s’avérer complexes.

Formation professionnelle vs formation générale : un choix éclairé ?

Le cœur du système éducatif en Suisse, c’est sa formation professionnelle. Dès 15 ans, de nombreux jeunes entrent dans la vie active grâce à une attestation fédérale de formation professionnelle (AFP) ou un CFC. La formation professionnelle supérieure permet ensuite de poursuivre leurs études, parfois jusqu’au niveau tertiaire.

Mais la valeur perçue de la formation générale vs formation professionnelle reste inégale. Certains parents préfèrent encore pousser leurs enfants vers le gymnase ou la maturité gymnasiale, pensant que c’est le seul vrai passeport pour la réussite. Pourtant, les programmes de formation professionnelle sont tout aussi exigeants, voire plus réalistes dans certains cas.

Les filières de formation sont-elles suffisamment perméables ?

Le mot-clé du système suisse est perméabilité. Cela signifie qu’un élève peut changer de filière, reprendre ses études après une formation, ou passer d’un apprentissage à une haute école spécialisée. Cette flexibilité est réelle, mais elle nécessite de la motivation, du soutien, et parfois une bonne dose de résilience.

Dans les faits, peu d’élèves franchissent les passerelles. Une fois entré dans une voie, il est difficile d’en sortir, surtout sans accompagnement personnalisé. Le travail de maturité, demandé dans les écoles de maturité, est un bon exemple d’exigence intellectuelle. Mais il peut décourager ceux qui manquent de méthodes ou d’encadrement.

Que disent les élèves suisses sur leur préparation à la vie réelle ?

En tant qu’enseignant privé, je rencontre des jeunes en questionnement. Ils ont suivi les cours, validé les modules, parfois réussi avec brio, mais se sentent démunis pour affronter le quotidien : gérer un budget, trouver un stage, rédiger une lettre de motivation, ou gérer le stress.

Le système éducatif suisse met peu l’accent sur ces compétences dites “de vie”. Certes, les hautes écoles spécialisées ou les écoles de culture générale proposent quelques cours spécifiques permettant de poursuivre une formation professionnelle dans les domaines de la santé ou du social. Mais l’enseignement de culture générale reste encore trop théorique.

Si votre enfant manifeste ces difficultés, découvrez comment savoir s’il a besoin de cours de soutien.

Quel est le rôle du soutien privé dans un système public performant ?

L’existence de cours privés, de coaching scolaire ou d’appuis personnalisés peut paraître paradoxale dans un système aussi bien structuré que le système scolaire suisse. Pourtant, la demande explose. Pourquoi ? Parce que les élèves manquent parfois de soutien individualisé, ou de réponses à leurs doutes et aspirations.

Le public remplit son rôle sur le plan académique, mais peine à accompagner la singularité de chaque parcours. Dans ce contexte, le soutien privé devient une valeur ajoutée, un espace où l’on peut parler de ses craintes, reprendre confiance en soi, ou développer des stratégies d’apprentissage personnalisées.

Le système éducatif en Suisse est-il vraiment à la hauteur de sa réputation ?

Oui, le système éducatif suisse est solide, flexible, et souvent efficace. Il accorde une grande importance à l’équilibre entre théorie et pratique, à la diversité des filières de formation, et à la reconnaissance des compétences. Il est aussi fondé sur une coordination fédérale forte entre la confédération et les cantons.

Mais il est perfectible. Il faut aller plus loin dans la prise en compte du bien-être des élèves, dans la valorisation de tous les parcours (et pas uniquement du gymnase), et dans la préparation à la vie réelle. Le système scolaire suisse mérite de rester un modèle – mais un modèle vivant, capable de s’adapter aux défis du XXIe siècle.

 

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